Les Mélanomes

Les mélanomes se développent à partir de la mélanocytes, les cellules qui produisent le pigment du bronzage, la mélanine. Les mélanocytes résident dans les couches profondes de l’épidérme.

Les grains de beauté ou naevi résultent de la multiplication et du regroupement de mélanocytes normaux.

Une des particularités du mélanome par rapport aux autres tumeurs cutanées malignes, carcinomes baso et spinocellulaires, est son aptitude à envahir les tissus au-delà de la peau (les muscles, les ganglions) et à aller se greffer (métastaser) dans les organes distants (les poumons, le foie, le cerveau…).

Etiologie: 

La pigmentation de la peau et la réaction à l’ensoleillement constituent deux facteurs de risque importants et clairement établis dans la survenue d’un mélanome. Globalement, plus la peau est foncée, plus faible est la probabilité de développer un mélanome.

Plus la peau est claire et plus l’individu présente des marqueurs roux (tâches de rousseur, quelques poils roux dans la barbe, cheveux auburn ou blond vénitien), plus son risque est important. le mélanome se développe principalement chez les personnes à peau claire qui s’exposent de façon irrégulière (au cours des vacances) et sujettes à des érythèmes solaires (coups de soleil).

Le nombre de grain de beauté est également un facteur important dans le risque de mélanome.

Certains mélanomes naissent d’un grain de beauté mais un mélanome peut parfaitement se développer sans grain de beauté préexistant, c’est même la situation la plus fréquente (70 à 80% des cas).

Les personnes ayant ou ayant eu des membres de leur famille atteints présentent un risque supplémentaire et l’on estime que 10% des mélanomes sont attribués directement à cette prédisposition génétique.

Certains mélanomes se développent dans des zones non exposées au soleil (la plante des pieds, les muqueuses) ce qui suggère l’existence de mécanismes de survenue différents.

Présentation clinique

Le diagnostic clinique de mélanome est évoqué dans le cas de l’apparition d’une pigmentation général Asymétrique, avec des Bords irréguliers, encochés, polycycliques, avec une Couleur inhomogène, allant du brun clair au noir foncé, avec un Diamètre supérieur à 6 mm ou avec une apparence qui Evolue au fil du temps, changeant d’aspect, de taille, de couleur et d’épaisseur.

Le mélanome est une lésion cutanée qui se modifie. Toute lésion brune, noire, ou rougeâtre, qu’elle ressemble ou non à un grain de beauté, qui pousse rapidement ou change rapidement, doit amener à consulter.

Les différentes types de mélanome :

On distingue classiquement quatre types de mélanomes :
  • Le mélanome superficiel extensif, qui se présente comme une tache ou un grain de beauté qui s’étend, prend une forme irrégulière, avec une couleur inhomogène (noir, marron, rouge, sans couleur). Sur cette lésion, souvent plate et non palpable en début d’évolution, se développe plus ou moins rapidement un petit relief. Ces mélanomes constituent la majorité des mélanomes (70-80%).
  • Le mélanome nodulaire (saillie arrondie de couleur noire ou parfois non colorée), de consistance ferme, pouvant s’ulcérer, se recouvrir d’une croûte, suinter ou saigner. Ces mélanomes ont en général une croissance rapide (semaines à mois), et ils représentent 5 à 20% des mélanomes.
  • Le mélanome de Dubreuilh (tache pigmentée, inhomogène, allant du noir au marron foncé) qui ressemble a une tache de vieillesse, s’étend très lentement sur les zones exposées au soleil (le visage principalement) chez le sujet âgé et endort souvent la vigilance.
  • Le mélanome acral-lentigineux est observé sur les paumes ou les plantes de pieds (tache brune ou noire aux contours irréguliers), au niveau des ongles (bande noire > 6mm de large, pigmentation irrégulière), sur les zones cutanées non exposées au soleil. La tache brune donne volontiers un aspect un peu crasseux sous la plante des pieds, mais ne disparaît pas, et finit par donner une tumeur.

Facteurs pronostics :

Pour les mélanomes dont l'extension est purement locorégionale, trois éléments essentiels conditionnent le pronostic : l'indice de Breslow, la présence d'une ulcération de la lésion et l'existence d'un envahissement éventuel des ganglions lymphatiques.

L'examen anatomo-pathologique de la tumeur à partir de la biopsie réalisée va permettre, d'une part, de confirmer le diagnostic et, d'autre part, de donner un certain nombre d'indications sur la gravité de la tumeur, en particulier en appréciant son épaisseur l’indice de Breslow.

L'indice de Breslow témoigne de l'importance de l'invasion de la tumeur en profondeur et reflète l'agressivité de la lésion et son aptitude à rejoindre les vaisseaux lymphatiques ou sanguins environnants. Plus une tumeur est épaisse, plus elle a envahi la peau en profondeur, plus elle est agressive.

Le fait qu'une tumeur soit ulcérée est également un facteur de moins bon pronostic ; la présence d'une ulcération témoignant d'un désordre tel des mélanocytes qu'il y a agression du revêtement cutané. Le troisième élément témoignant d'un moins bon pronostic est la présence de cellules tumorales au niveau ganglionnaire ; cette présence pouvant être évaluée indirectement par l'examen clinique (palpation de ganglions augmentés de volume dans les zones ganglionnaires) et par l'échographie.

Il est apparu récemment que la présence de micrométastases, c'est-à-dire la présence de cellules tumorales dans des ganglions sans que ceux-ci soient augmentés de volume était également un facteur de moins bon pronostic. La recherche de ces micrométastases nécessite l'ablation du ganglion que l'on veut contrôler, ce qui se fait par la technique dite la ganglion sentinelle. Le principe de cette technique est d'injecter un traceur (c'est-à-dire une substance dont on peut aisément suivre le déplacement) juste sous la lésion ou sous l'endroit où elle a été enlevée ; ce traceur va être drainé par les vaisseaux lymphatiques et être conduit directement jusqu'au premier ganglion lymphatique situé sur ce circuit de drainage, appelé le ganglion sentinelle.

C'est ce ganglion ou ce groupe de ganglions que l'on prélève ensuite chirurgicalement et que l'on examine à la recherche de cellules cancéreuses. Cette technique du ganglion sentinelle n'est pas employée systématiquement car elle n'a pas toujours d'influence directe sur le traitement qui est proposé au malade. Elle apporte en revanche une indication importante sur le risque évolutif.

Le traitement

Le traitement du mélanome est avant tout chirurgical, l'acte curatif reposant sur l'exérèse complète de la lésion et d'une zone de peau saine environnante. Dans certains cas, le traitement peut également faire appel à l'immunothérapie, à la chimiothérapie ou à la radiothérapie. Le traitement des mélanomes localisés repose uniquement sur l’exérèse chirurgicale large de la lésion. Cette exérèse doit être réalisée en retirant une zone de peau saine entre 1 et 2 centimètres tout autour de la lésion, appelée marge de sécurité. En règle générale, la biopsie-exérèse initiale permet d' enlever la totalité de la lésion suspecte, d'affirmer le diagnostic, et d'analyser les critères microscopiques. En fonction des facteurs pronostiques mis en évidence par l’examen anatomo-pathologique et en particulier en fonction de l'épaisseur de la tumeur mesurée par l'indice de Breslow, une intervention chirurgicale complémentaire peut être nécessaire afin de retirer une zone plus large en surface et en profondeur autour de la tumeur. En fonction de l'importance de la zone enlevée chirurgicalement, la plaie sera refermée directement par rapprochement direct des berges avec des points de suture ou nécessitera une greffe cutanée. Selon le siège de la lésion initiale, sa taille, la décision éventuelle d'étudier le ganglion sentinelle sera prise ; l'acte chirurgical visant à retirer ce ganglion sera plus ou moins complexe suivant la zone concernée. Lorsque la tumeur n'est pas strictement localisée au niveau de la peau, le traitement chirurgical local de la lésion est complété par l'ablation des ganglions (appelée "curage ganglionnaire") dès lors qu'il existe une atteinte ganglionnaire. En revanche, le curage ganglionnaire systématique à titre préventif, c'est-à-dire sans qu'il existe d'atteinte ganglionnaire clinique ou microscopique, n'a pas d'indication et n'apporte pas de bénéfice complémentaire. Il est par contre possible, dans certains cas, d'essayer d'éviter la survenue d'atteinte ganglionnaire ou plus à distance en ayant recours à un traitement médical complémentaire, ou traitement adjuvant, en utilisant l'interféron. Cette molécule n'est pas une chimiothérapie, mais un stimulant de l'immunité du sujet contre le mélanome. Une cure d'interféron prescrite pendant 18 mois en général réduit les risques du mélanome, mais au prix d'effets secondaires pénibles (syndrome pseudo-grippal). Ce traitement médical a fait la preuve de son efficacité et figure dans les recommandations de prise en charge mais son utilisation est indiquée au cas par cas par les spécialistes du traitement du mélanome. Ils mettent ainsi en balance les bénéfices possibles de ce traitement et ses inconvénients (fatigue, baisse des performances physiques et intellectuelles). En général, la mise sous ce type de traitement s'effectue après une discussion approfondie avec le malade, afin qu'il puisse se faire une idée des bénéfices à espérer et des inconvénients possibles. Dans le cas de mélanomes non opérables ou ayant déjà évolué à distance de la peau (ganglions ou autres organes), le traitement fait en général appel à la chimiothérapie. Cette chimiothérapie utilise le plus souvent un seul agent anticancéreux, comme le déticène, la fotémustine et, dans certains cas, la vindésine, le carboplatine, le taxol. Ces monochimiothérapies utilisées dans le mélanome, avec schématiquement un rythme mensuel, comportent assez peu d'effets secondaires. Elles entraînent peu de pertes de cheveux (déticène) ou de manifestations particulièrement gênantes ; les principaux inconvénients en sont des modifications du nombre de cellules sanguines qui ne donnent en général pas de manifestations cliniques. A coté de ces chimiothérapies, on fait souvent appel à de nouveaux traitements encore en voie d'évaluation, mais qui portent beaucoup d'espoir .

Suivi

Une fois l’exérèse élargie de la tumeur réalisée, le malade fait l’objet d’une surveillance régulière et prolongée pour à la fois dépister un second mélanome cutané éventuel, et surtout, pour vérifier que le mélanome enlevé n’a pas envoyé de métastases qui peuvent se développer dans un autre organe.

  • Dépister un second mélanome

Les mêmes causes produisant les mêmes effets, le fait que quelqu’un ayant eu un mélanome puisse en développer un autre est assez logique puisque la prédisposition génétique et l’exposition au facteur environnemental persistent chez cet individu. L’examen de la peau doit être régulier, surtout chez les sujets avec beaucoup de grains de beauté et syndrome du naevus atypique. Il nécessite des visites chez le dermatologue qui utilisera notamment la dermoscopie et des photographies de référence pour cette surveillance.

  • Dépister des métastases du mélanome

Le suivi comporte systématiquement, environ 4 fois par an, une surveillance ganglionnaire par la palpation pour détecter une métastase et une surveillance cutanée pour déceler une récidive. Des examens complémentaires peuvent être pratiqués dans certains cas pour rechercher d’éventuelles atteintes ganglionnaires ou à distance (échographie ganglionnaire ou hépatique, scanner thoracique…). Ces examens sont réalisés en fonction de chaque situation spécifique et du niveau de risque.